Le Québec à l'heure du virage e-Santé
Le Québec compte de plus en plus d’internautes. Qui plus est, Internet s’impose comme une source importante d’information sur la santé. Quels sont les usages actuels des internautes en lien avec la santé et comment envisager le développement des services de santé sur Internet ?
Les dernières statistiques le
confirment, les technologies de l’information (TI) font
désormais partie de notre quotidien et occupent une place de
choix dans les sphères professionnelle et privée. À juste
titre, les résultats de l’enquête NETendances, publiés au
printemps dernier par le CEFRIO, indiquent que 71 % des
adultes québécois utilisent désormais Internet de façon
régulière à la maison, au travail, à la bibliothèque, à
l’école ou ailleurs (contre 66 % l’an dernier), ce qui
représente, en nombre absolu, 4,4 millions de personnes. Le
secteur de la santé se trouve directement concerné par ces
résultats en constante évolution. En clair, ces résultats
signifient qu’une majorité des intervenants des hôpitaux,
cliniques et centres font partie de ce bassin d’internautes
et que la clientèle visée par les services de santé
représente une masse critique d’utilisateurs d’Internet. La
table est donc mise pour que des soins de santé intégrant
les TI soient offerts et utilisés au Québec.
Le
Québec numérique
Année après année, les Québécois se
font plus nombreux sur Internet et diversifient leurs usages
technologiques. À preuve, l’enquête NETendances 2007 montre
que la majorité des Québécois de 18 ans et plus possèdent un
ordinateur à leur domicile (83 %) et habitent des foyers
branchés à Internet (72 %), principalement à la haute
vitesse (83 % des foyers branchés). En outre, les adultes
québécois possèdent une adresse courriel (63 %), utilisent
des Wikis (19 %), participent à des sites de réseautage (17
%), utilisent la baladodiffusion (16 %), déposent des
photographies sur des sites de partage d’images (15 %),
partagent des vidéos en les plaçant sur des sites (11 %) et
consultent des blogues (26 %). Une panoplie d'usages qui en
dit long sur le niveau d’appropriation des internautes
québécois des divers outils offerts sur Internet.
Et qu’est-ce que ce portrait technologique signifie pour le
milieu de la santé ? Les Québécois sont aujourd’hui branchés
et utilisent de plus en plus les outils proposés sur la
Toile. Le milieu de la santé peut, par conséquent, profiter
de cette situation pour proposer des services électroniques
et exploiter les nouveaux moyens de communication mis à leur
disposition sur Internet. D’ailleurs, les dernières données
colligées dans le cadre de NETendances sont probantes à ce
propos. Les Québécois associent aisément Internet et soins
de santé.
Le
e-patient
En 2007, 36 % des adultes québécois
ont utilisé Internet pour chercher des renseignements sur la
santé, pour eux ou pour quelqu’un d’autre. Cette proportion
demeure stable en 2008, c’est du moins ce qu’indiquent les
résultats de la collecte tenue en février (36 %). Pour les
questions de santé, il apparaît que l’an dernier, ce sont
les femmes qui ont effectué davantage de recherche sur le
sujet que les hommes (43 % contre 29 %). De plus, les
adultes qui ont des enfants effectuent plus de recherche en
ligne sur la santé que ceux qui n’en ont pas (41 % contre 33
%). Les premiers résultats tirés de NETendances 2008
confirment cet engouement des internautes pour les questions
de santé et permettent d’en apprendre davantage sur le genre
de démarches qu’ils entreprennent sur Internet.
À ce chapitre, il
semble que 24 % des adultes québécois cherchent des
renseignements sur une maladie en particulier, 23 % sur le
traitement de maladies, 22 % sur le mode de vie (régime,
nutrition, exercice, prévention des maladies) et 20 % sont
en quête d’informations en lien avec des symptômes précis.
Au cours de l’année 2007, 30 %
des adultes québécois ont utilisé Internet souvent ou à
l’occasion pour chercher des renseignements relatifs à une
maladie ou à un médicament. Loin derrière, on retrouve
l’utilisation d’Internet, souvent ou à l’occasion, pour
repérer géographiquement un professionnel de la santé (10 %
des adultes québécois), pour gérer ou vérifier l’état des
remboursements liés aux dépenses de la santé (8,0 % des
adultes québécois) et pour vérifier un diagnostic donné par
un médecin (5,9 %).
Bref, bien que l’on remarque l’émergence de nouvelles
pratiques en matière de santé électronique, les Québécois
utilisent Internet principalement pour y chercher de
l’information. Ce phénomène a pour conséquence de modifier
la relation entre le patient et le spécialiste de la santé
puisque les patients sont mieux informés et posent davantage
de questions.
Le
modèle américain
Chez nos voisins du Sud, la demande
d’information sur la santé de la part des internautes ne
cesse de croître et il semble que l’offre de service dans ce
secteur suit cette tendance. Ainsi, les résultats d’une
enquête menée en février 2007 par Cisco arrivent à des
conclusions qui ne peuvent être ignorées par le milieu de la
santé. Un Américain sur trois considère que l’utilisation
d’Internet modifie sa façon de gérer sa santé et de se
maintenir en santé1. De plus, une personne sur quatre se dit
en meilleure santé grâce à Internet. Pour sa part,
eMarketer2 publiait les résultats d’un sondage réalisé
auprès d’adultes américains branchés. Il apparaît que 59 %
d’entre eux ont utilisé Internet au cours des douze derniers
mois comme source d’information sur la santé (blogues, sites
Web, moteurs de recherche, publicités, forums de discussion
réseaux sociaux, etc.). Une autre enquête d’eMarketer3,
cette fois menée en septembre 2007, indique que 60 % des
adultes américains souhaitent rejoindre leur médecin par
Internet et accéder en ligne à leur dossier médical, à leurs
résultats de laboratoire ainsi qu’à leur calendrier de
rendez-vous.
Les grands joueurs de l’univers Web ont saisi le potentiel
financier associé aux services de santé en ligne. À titre
d’exemple, Google a annoncé en mars 2008 le lancement
prochain de son site Google Health. L’internaute pourra y
transférer toutes ses informations médicales électroniques
(dossier de santé, prescriptions, résultats de laboratoire,
etc.). L’intérêt de centraliser ses données de santé
permettra, selon Google, de gérer plus facilement les
informations médicales le concernant et de bénéficier d’une
panoplie de services automatisés tels des rappels de
médication et le renouvellement de prescriptions… Le site
est actuellement à l’essai auprès de quelques milliers de
patients de la Cleveland Clinic. Microsoft est aussi dans la
course avec son portail HealthVault lancé en 2007. Le géant
mise ainsi sur un site Web offrant les services de
professionnels aux internautes. Ces services, de différentes
natures, peuvent aller de la gestion du dossier médical aux
outils de contrôle du poids.
Le modèle d’affaires de ces deux plateformes repose sur des
offres publicitaires très ciblées, personnalisées à partir
des informations disponibles dans les dossiers de santé
électroniques. Google et Microsoft se font rassurantes quant
à la protection des informations personnelles puisque pour
accéder à ces informations, les entreprises devront
s’engager à en préserver la confidentialité. De plus,
l’internaute sera en mesure de contrôler et d’autoriser
l’accès des tiers à ses informations personnelles.
Au Canada, la situation diffère. On ne retrouve pas ici la
logique commerciale américaine poussant les acteurs du
milieu de la santé à s’affilier aux entreprises privées pour
offrir à leurs clientèles des dossiers de santé
informatisés. C’est l’instance gouvernementale Inforoute
Santé Canada qui est mandatée pour veiller à la bonne marche
de l’informatisation des dossiers de santé. De plus, les
informations médicales sont pour le moment disponibles à
travers les réseaux informatiques privés du milieu de la
santé et non publiquement sur Internet comme aux États-Unis.
Par contre, l’intérêt que suscite le Web pour les questions
de santé reste similaire d’un pays à l’autre. Il sera ainsi
important de suivre l’évolution de l’intérêt des internautes
québécois pour les services de santé électroniques et de
voir à quel point cet intérêt aura un impact sur la
diffusion des informations médicales personnelles sur
Internet.
Notes :
1 : Cisco. « One in Three Americans Report that Internet
has Changed the Way They Manage Their Health Care, New Study
Reports », 27 février 2007.
2 : « Internet May Be Good for Your Health », eMarketer,
17 janvier 2008.
3 : « Consumers Demand Health Care Info Online »,
eMarketer, 14 mars 2008.
Date de publication : 27 juin 2008
Source : CEFRIO,
http://www.cefrio.qc.ca/fr/documents/veille/Le-Quebec-a-lheure-du-virage-e-Sante84.html
Recherche : Ronald Doucet
Le 13 septembre 2008